En février 2024, l’Arena Porte de la Chapelle, pôle culturel et omnisport de la Ville de Paris qui accueillera plusieurs épreuves des Jeux Olympiques et Paralympiques 2024, recevait le label Accessibilité avec la note AA, certifiant les performances élevées du site sur les enjeux d’accessibilité et de confort pour ses usagers. Une prouesse saluée par Hervé Duret, responsable du domaine qualité de vie chez CERTIVEA, certificateur engagé pour des cadres de vie durables et filiale du Centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB). Entretien.
Qu’est-ce que le label Accessibilité ?
Ce label créé par CERTIVEA en 2017 va bien au-delà des obligations réglementaires d’accessibilité prévues par la loi du 11 février 2005 dite « loi handicap » puisqu’il certifie les performances des bâtiments à la fois en matière d’accessibilité et d’usage pour tous, prenant en compte les personnes en situation de handicap physique ou cognitif comme les personnes ayant une incapacité temporaire ou permanente. Dans le même esprit, le label Accessibilité concerne un large spectre de bâtiments et d’équipements comme les bureaux, les commerces, les hôtels les équipements culturels et sportifs qu’ils soient en construction, en rénovation ou en exploitation. Seuls les établissements de santé ne sont pas concernés. La perspective des jeux olympiques et paralympiques 2024 aura permis de labelliser des équipements comme l’Arena de la Porte de la Chapelle à Paris et le centre omnisport de Clichy (Hauts-de-Seine). D’autres équipements devraient suivre prochainement.
Quels sont les contraintes imposées par ce label ?
Le label Accessibilité est exigeant. Il prend en compte les aspects d’usage tels que la facilité d’accès, en veillant à ce que les déplacements soient confortables et fluides à l’extérieur comme à l’intérieur du bâtiment. L’accueil se doit d’être convivial et identique pour tous, aux personnes valides comme aux personnes en situation de handicap. En termes de facilité d’usage, l’attention est portée sur la qualité de l’orientation, l’accès aux commandes d’éclairage, les manœuvres des portes et l’ergonomie des espaces d’hygiène. Le confort acoustique pour les personnes malentendantes et visuel pour les personnes malvoyantes est également évalué. Sont également traités tous les aspects de sécurité et de sûreté en termes de protection des personnes contre les risques de chute, les risques de choc, les mesures mises en place pour estomper les sentiments d’incertitude ou d’anxiété tel que le vertige ou encore le confinement. Tous les espaces doivent répondre correctement aux besoins des utilisateurs et chacune des prestations offertes doit être accessible à tous. Nous vérifions également la manière dont ces besoins ont été recensés puis pris en compte et comment s’articule le processus d’amélioration continue. Le label Accessibilité peut être recherché sur un an, sur un cycle de trois ans ou de cinq ans. Trois notes sont possibles pour les bâtiments labellisés : A, AA ou AAA.
Quels sont les points forts de l’Arena Porte de la Chapelle en termes de prise en compte des besoins de chacun ?
Ce label est remis pour la première fois à un équipement sportif d’une telle dimension : une capacité de 9000 places, incluant deux gymnases. L’Arena a notamment innové en direction des personnes hypersensibles (troubles du spectre autistique) avec la création d’une sensory room, une salle hyposensorielle leur permettant de s’isoler si besoin du bruit et de la foule, tout en continuant de suivre le spectacle avec un proche. C’est une première en France sur un équipement sportif. L’équipement a prévu des places faciles d’accès, plus larges et avec un accès sans marche, pour les personnes mal marchantes ou accompagnées d’un chien guide. Des prises électriques ont été prévues pour recharger les fauteuils roulants électriques ainsi que des emplacements pour déposer leurs affaires. Dans les toilettes, non genrées, les aires de rotation sont très généreuses avec des transferts droite ou gauche selon les besoins. Pour les athlètes à mobilité réduite, les vestiaires sont équipés de tables de change adaptées. A l’extérieur, les places de parking permettent le débarquement arrière ou latéral et des balises sonores guident les visiteurs présentant un handicap visuel vers l’entrée. Enfin, des informations en braille sont indiquées sur les mains courantes.
Un autre équipement situé à Clichy, dans les Hauts-de-Seine mérite lui aussi d’être mentionné pour la prise en compte de tous les publics dans ses aménagements…
En effet, le centre sportif et culturel de la ville de Clichy, pensé pour être inclusif, est exemplaire et unique en termes d’accueil d’activités et de manifestations handisport. Il vise la labellisation Accessibilité triple A. Par exemple, il est équipé d’ascenseurs capables d’accueillir jusqu’à six fauteuils roulants de sportifs afin de fluidifier l’accès aux salles. La salle principale est dotée de vastes vestiaires accessibles aux personnes à mobilité réduite. Quant aux sols sportifs de la plus grande salle d’environ 1000 m2, ils ont été conçus pour la pratique du sport en fauteuil.
Les décideurs publics ont-ils pris conscience de l’importance de rendre leurs équipements accessibles au plus grand nombre ?
La mise en accessibilité est un travail de longue haleine. Entre la prise de conscience, bien réelle chez les élus locaux, l’adaptation à la réglementation puis l’intégration des normes d’accessibilité dans le quotidien, la route n’est pas simple. Rappelons que la labellisation est un parcours d’auto-évaluation par le demandeur, puis de vérification et d’audit par des intervenants extérieurs. Nous ne pouvons que saluer la forte volonté de ces maîtres d’ouvrage qui se sont fixé des objectifs très ambitieux à travers une démarche volontaire de conception universelle pour ouvrir les équipements non seulement aux sportifs et leurs accompagnants lors des jeux olympiques mais aussi à l’ensemble de la population après les Jeux. Ils ont porté une très forte attention à ces problématiques d’accessibilité, accompagnés dans leur démarche par des associations et des bureaux d’études spécialisé en handicap-accessibilité qui les ont aidés dans l’évaluation, dans la modification de certaines prestations pour répondre aux enjeux du label. Ils ont également su être attentifs aux préconisations des associations sportives pour améliorer l’expérience de leurs équipements. Un véritable travail partenarial. Par ailleurs, d’importants moyens financiers ont été mis en œuvre pour répondre à cette ambition de conception universelle.
Propos recueillis par Blandine Klaas