Pour la première fois en France, un même service public de location de vélos à proximité des gares est déployé dans quatre agglomérations sur une zone de 120 kilomètres, avec une même flotte de vélos, une même identité visuelle, une même tarification et une même application mobile. Ce modèle expérimenté en Nouvelle-Aquitaine pourrait faire des émules.
Il est fréquent, dans les villes moyennes, que les gares soient éloignées des zones d’activité et de loisirs sans que pour autant l’offre urbaine de transport ne soit suffisante pour répondre aux besoins de déplacement. Pour y remédier, le syndicat mixte régional de transports Nouvelle-Aquitaine mobilités et l’entreprise Fifteen, spécialisée dans la conception, la fabrication et le déploiement de services publics de location de vélos, ont imaginé un nouveau service de partage de vélos disponible dans les gares. « Certaines personnes préfèrent l’usage de la voiture à celui du train parce qu’une fois arrivées à la gare, elles ne savent pas comment atteindre leur destination finale. L’idée du système Vélo Modalis est de proposer une solution pour les derniers kilomètres du parcours tout en développant l’usage du train» explique Hamira Haberah, co-fondatrice de Fifteen. Depuis plus d’un an, le service de partage Vélo Modalis est installé dans neuf gares ferroviaires de la ligne TER Royan-Angoulême pour encourager la pratique du vélo sur le territoire, en intermodalité avec le TER et les cars interurbains. Pour la somme de quinze euros par mois, les abonnés du TER et des cars régionaux peuvent emprunter un vélo à la gare et l’utiliser jusqu’à douze heures par jour, avec la possibilité de réserver le vélo en station 1h30 à l’avance. Pour les visiteurs occasionnels, la location est accessible grâce au pass 24h ouvert aux locaux et aux touristes.
Un projet inédit
« Nous avons travaillé le projet avec notre partenaire industriel Fifteen, puis nous l’avons présenté aux agglomérations de Saintes, Cognac, Royan et Angoulême ainsi qu’à la région qui ont accepté de nous suivre. Ce travail de mobilisation des parties prenantes vers un objectif commun a duré environ un an et demi, précise Jérôme Kravetz, directeur de Nouvelle Aquitaine mobilités. Nous avons bénéficié d’une dynamique collective très forte en partie aussi parce que la question du vélo était déjà mûre sur notre territoire. » Le système Vélo Modalis est inspiré des modèles déjà existants aux Pays-Bas où 75% des gares du pays sont équipées de vélos en libre-service. Avec une différence majeure puisqu’il combine plusieurs durées de location et la flotte est 100% électrique. Selon l’opérateur Fifteen, ce nouveau modèle de service de vélos nécessite une communication et des process opérationnels radicalement différents de ceux déployés dans les services urbains classiques, en particulier la réallocation des vélos et le lissage de la flotte sur l’ensemble du territoire, en fonction des besoins. Coût total de l’opération, 700.000 euros portés par Nouvelle-Aquitaine Mobilités à hauteur de 100 K€ (dont 50 K€ par la Région Nouvelle-Aquitaine, le reste par les agglomérations de Grand Angoulême, Grand Cognac et Royan Atlantique), 100 K€ par l’Ademe dans le cadre de l’appel à manifestation d’intérêt Tenmod et le reste par Fifteen.
25% des trajets en sortie de train
En juin 2024, Vélo Modalis comptabilisait déjà plus de 20.000 trajets effectués dont un quart en sortie de train sur l’ensemble des trajets effectués sur le service. Des records d’utilisation ont été enregistrés tout au long de l’été. La force du projet selon le Jérôme Kravetz, repose sur la richesse des offres proposées « à la fois des vélos en ville, là où se trouvent les principaux spots d’utilisation, mais aussi en gare sur un territoire qui comprend quatre agglomérations importantes. Quels que soient votre lieu de résidence de départ et votre lieu de travail, il est possible d’utiliser indistinctement les vélos avec une seule marque, un seul abonnement et une seule tarification sur quatre agglomérations et territoires différents. Nous avons simplifié le chemin à l’usager qui dispose des mêmes vélos quelle que soit la gare de départ ou d’arrivée. Soit une seule et même offre en continuité.»
D’autres villes et agglomération de Nouvelle-Aquitaine s’intéressent à ce projet, tout comme la région Bretagne et la région Grand Est qui observent attentivement son évolution. « Le service ne doit pas faire oublier le besoin d’infrastructures. Il est important que le territoire soit déjà équipé pour le vélo et qu’il dispose d’infrastructures pour sécuriser les cyclistes, notamment à mesure que l’on s’éloigne des zones urbaines, ajoute ledirecteur de Nouvelle Aquitaine mobilités. Un bon maillage du réseau, permettant de se rendre d’un point stratégique à un autre est indispensable. Rappelons enfin que le succès du report modal repose sur la qualité de l’offre proposée. Cette offre doit aller au-delà des frontières territoriales ou administratives. Elle doit également permettre d’intégrer la dynamique régionale dans les offres urbaines et inversement. Au-delà de l’expérimentation, Vélo Modalis a joué le rôle d’un accélérateur de collaboration autour des sujets vélos : ce sera un héritage très précieux. » A moins de six mois de la fin de l’expérimentation, les discussions sont en cours pour décider des modalités de pérennisation d’un tel système. Et trouver un modèle économique soutenable.